L’hypnose : magie noire ou médecine ?

Publié le par Laurent

Les spectacles de Messmer, les émissions télé ou les performances d’hypnose de rue (comme la vidéo ci-dessous), donnent à l’hypnose l’image d’un pouvoir occulte et dangereux, qui permettrait à des « gourous » de prendre le pouvoir sur des individus.
Pourtant, dans un récent rapport, le très sérieux
INSERM a conclu à l’intérêt scientifique de cette pratique, notamment dans le traitement du côlon irritable ou pour réduire la prise d’antalgiques ou de sédatifs lors d’interventions chirurgicales.
Alors, l’hypnose, magie noire ou médecine ?




Hypnose de spectacle et hypnose médicale

En réalité, il faut distinguer l’hypnose de spectacle de l’hypnose médicale. Si aucune ne relève de la sorcellerie et les deux mènent à un état de conscience modifié, elles diffèrent dans leurs objectifs et leurs méthodes.

En effet, pour l’hypnose de spectacle, des sujets particulièrement réceptifs sont sélectionnés, afin de donner les meilleurs résultats possibles pour assurer le show. En thérapie, le patient n’est pas sélectionné en fonction de ses prédispositions hypnotiques, il faut composer avec tout type de personnes. Ici, il ne s’agit pas de donner des effets spectaculaires, mais d’accompagner au mieux un processus thérapeutique (comme le montre la vidéo ci-dessous).



L' hypnose medicale par france3bassenormandie_845

Dérives hypnotiques

Pour Yves Halfon, Vice-Président de Confédération Francophone d'Hypnose et Thérapies Brèves, avec l’hypnose de rue ou de spectacle, il se crée une «relation perverse, qui pourrait être préjudiciable à la personne qui se prête au jeu du manipulateur ». En effet, il explique qu’il s’agit « d’une manière de prendre le pouvoir sur l’autre sans qu’il s’en aperçoive et sans qu’il puisse se défendre », de violer son espace de confort.

En dehors des shows consacrés à l’hypnose où participants et spectateurs savent à quoi s’attendre, de telles manipulations dans la vie courante peuvent entrainer des conséquences bien plus graves. Par exemple, dans le domaine du marketing, le recours à la « covert hypnosis » (hypnose camouflée) peut donner les moyens à un commercial d’abolir votre sens critique afin de s’assurer de la vente de son produit. Pour cela, il vous invitera à concentrer toute votre attention sur le produit, sans vous donner l’opportunité d’émettre la moindre objection. De même, l’hypnose peut être également utilisée par des mouvements sectaires, afin d’enrôler plus efficacement de nouveaux adhérents.

Dans un cadre médical, il faut se méfier des médecins et psychologues utilisant l’hypnose pour aider leur patient à retrouver la mémoire. Sigmund Freud recourait à cette pratique, au début de sa carrière. Il retrouvait alors très fréquemment des abus sexuels infantiles pour expliquer des troubles psychologiques. Il a rapidement abandonné cette technique, jugeant les résultats louches. A cet égard, le docteur Jean-Marc Benhaiem explique pourquoi « l’hypnose ne permet pas de retrouver la mémoire des faits réels ». La mémoire n’est pas comme un disque dur qui enregistrerait fidèlement des données, elle est vivante et se modifie en permanence. Elle peut donc transformer la réalité, en fonction de son imaginaire. Si l’hypnose médicale peut inviter à se replonger dans des souvenirs dans le cadre d’un accompagnement thérapeutique, elle ne peut servir à apporter la preuve fidèle d’évènements passés. Il faut donc fuir un médecin qui vous ferait croire le contraire.

Manque de repères

La classification entre hypnose de spectacle et hypnose médicale ne suffit donc pas à épuiser le sujet et à distinguer les amuseurs publics, dangereux ou pas, de professionnels de santé, bien intentionnés ou pas.

En France, il n’existe pas de cadre légal précis encadrant la pratique de l’hypnose. De plus, les diplômes universitaires consacrés à cette discipline ne sont pas reconnus par l’Ordre des Médecins. Quand elle est pratiquée dans les hôpitaux, ce qui est de plus en plus courant, cette pratique n’est pas prise en charge par la sécurité sociale.

Pour clarifier cela, des professionnels de santé poussent à ce que leur soit réservé l’enseignement de l’hypnose et que « cette discipline reste dans un cadre médical ». Ce à quoi s’opposent certains hypno-thérapeutes, qui y voient l’œuvre d’un lobby en faveur d’une « protection de marché déguisée en lutte pour la sécurité des patients »
 

Au-delà du débat scientifique sur l’intérêt et l’efficacité de certaines pratiques d’hypnose, qui ont prouvé leur utilité, un travail de pédagogie et de clarification est donc à faire pour distinguer clairement ce qui relève du spectacle, de la manipulation malintentionnée et de l’accompagnement médical.

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